Un domaine particulièrement intéressant et attrayant, dont l’étude n’a pourtant été faite systématiquement qu’au milieu du 20ème siècle, est l’équidécomposabilité selon le groupe des translations (notée T – décomposabilité dans la suite).
En voici deux exemples, le premier sur le même carré mais dans deux positions distinctes (figure 6), le second entre un hexagone et un carré (figure 7).
figure 6
figure 7
Diverses questions se posent alors, les unes concernant l’existence, les autres la construction effective de la décomposition de deux polygones plans, étant entendu qu’une première condition absolument nécessaire est d’avoir même aire. Nous appellerons équivalents deux polygones de même aire. D’où les questions :
1) Étant donnés deux polygones d’un plan de même aire, et un groupe d’isométries G de ce plan, existe-t-il toujours une équidécomposabilité de ces polygones selon G?
La réponse est oui si G est le groupe de toutes les isométries du plan. La démonstration en a été faite en 1832 par Farkas Bolyai* et l’année suivante par un officier prussien nommé Gerwien [1]. Cette dernière présente l’avantage sur l’autre d’être constructive, c’est-à-dire qu’elle donne les moyens effectifs et pratiques de réaliser concrètement cette équidécomposabilité pour deux polygones quelconques.
2) Si pour un groupe G la réponse est non, quelles sont les conditions nécessaires et suffisantes d’équidécomposabilité selon ce groupe (par exemple pour l’équidécomposabilité translative)? ; puis donner des méthodes de réalisation pratique de cette équidécomposabilité selon ce groupe.
Ce n’est qu’en 1951 qu’une réponse a été donnée à ce second ensemble de questions, par deux mathématiciens suisses H. Hadwiger et P. Glur [2]. En fait, dans leur article, Hadwiger et Glur étudient d’abord l’équidécomposabilité selon le groupe réunissant les symétries centrales et les translations (notée ST- équidécomposabilité) et démontrent que deux polygones plans sont toujours ST – équidécomposables.
Dans ce qui suit, nous allons donner successivement quelques constructions simples d’équidécomposabilité pour familiariser le lecteur avec les méthodes de Gerwien, Hadwiger et Glur. Puis nous présenterons leurs idées essentielles pour démontrer la ST – équidécomposabilité et la T – équidécomposabilité.
* Ami et correspondant de Gauss, père de Janos Bolyai, plus célèbre, qui est l’un des inventeurs de la géométrie non euclidienne.